Automnitudes
ou
Mémoires d’automne

Au retour à la maison après chaque journée de chasse, j’ose croire que la migration se prolongera un peu plus tard que les années passées, que la neige ne commencera pas vraiment avant la fin de la saison de la chasse de la gélinotte. C’est ainsi qu’au plus fort de l’hiver, je retrouve ma veste de chasse les poches encore emplies de divers souvenirs. J’y retrouve inévitablement quelques balles chargées spécifiquement pour la bécasse, un tas de douilles, me rappelant ma grande habileté à tirer tout autour des bécasses, quelques plumes (preuve que, de temps à autres je réussi malgré tout à atteindre la cible), un tas de brindilles séchées accumulées dans mes poches lors de mes chasses.

Le cœur gros, un tourbillon de souvenirs m’envahissent et m’étourdissent : la vision de mon plus beau couvert, l’œil vif, complice et impatient de mon chien humant l’air en sortant la tête de sa cage ; un frisson dans les feuilles de peupliers ; le grelis grelis du ruisselet ; les effluves de feuilles humides, de poudre à fusil, de chien mouillé ; une impression d’humidité fraiche : des pantalons trempés, l’eau ruisselle le long de mon avant-bras ; ma main agrippe fermement ma fidèle escopette ; la cloche tinte, elle ralentit, hésite ; arrêt intense, le silence, quelques battements de cœurs et d’ailes, bref, un instant d’éternité…

 

Louis Cimon, février ‘92